
A moins de cinq mois du premier tour de l’élection présidentielle, le dialogue s’annonce incontournable. Ce sera d’ailleurs la prochaine occupation des acteurs politiques guinéens. Chacune des parties prenantes affûte ses armes dans la discrétion tout en prenant le soin de faire avancer quelques opinions pour sonder la partie adverse.
Le débat sera houleux, sinon très houleux. Mais il aura lieu tout de même. Avant le scrutin présidentiel très attendu de cette année, mouvance et opposition devront se retrouver autour de la table pour renouer le dialogue, rompu depuis octobre dernier quand le projet de révision de la constitution prenait forme et l’opposition descendait dans la rue pour battre le pavé afin d’empêcher le plan.
Dans cette perspective, le pouvoir qui a tout l’intérêt à initier un dialogue structuré pour obtenir le soutien et l’implication des partenaires comme l’OIF, l’UA, l’Union européenne et les Etats-Unis a déjà commencé à tâter le terrain. Et c’est le Président de la République, Pr Alpha Condé, qui s’est mis à la tâche lui-même en annonçant une reprise prochaine des discussions avec ses opposants. En présidant jeudi dernier, au Palais, la cérémonie de décoration à titre posthume de l’ambassadeur américain Simon Henshaw, il avait clairement évoqué la nécessité de relancer le dialogue politique avant la joute électorale.
Au sein de l’opposition radicale, cette intention présidentielle ne procure pas pour l’instant beaucoup enthousiasme. Surtout quand on sait que le camp d’en face, très rusé, utilise depuis 2010 les dialogues politiques pour dérouler discrètement son calendrier. L’opposition qui entend reprendre les manifestations de rue après l’Etat d’urgence sanitaire pour dénoncer les arrestations politiques et les législatives contestées de mars, veut avoir quelques garanties avant d’entreprendre un quelconque dialogue.
A l’Union des forces démocratiques de Guinée, la principale force politique de l’opposition où on qualifie Alpha Condé de « vieux roublard », des voix parmi les plus autorisées appellent désormais le président à satisfaire quelques préalables au nombre desquels une annonce publique qu’il renonce à briguer un mandat supplémentaire. C’est en tout en cas ce qu’a laissé entendre le directeur de la communication de l’UFDG. « On ne fait pas un dialogue pour un dialogue. Quels sont les sujets à débattre ? Quelle sont les garanties ? Pour nous, il n’est pas question d’aller parler avec des gens qui opèrent un coup d’Etat Constitutionnel. Il y a des préalables à remplir et l’un des plus importants, c’est qu’Alpha Condé s’engage solennellement à respecter les termes de son mandat, à respecter l’esprit et la lettre de la Constitution qui l’a porté comme Chef d’Etat où il est clairement indiqué qu’il ne sera pas candidat à un troisième mandat consécutif ou non (…) c’est fondamental pour nous ».
La volonté affichée par Alpha Condé depuis le palais Sèkhoutoureyah est prise avec pincettes dans les QG des partis d’opposition où on entrevoie déjà une espèce de « poudre aux yeux », visant à les assommer, définitivement, après le coup de force des élections législatives de mars dernier.
Mamady Fofana