mercredi , 31 mai 2023

Au Mexique, le plus célèbre baron de la drogue s’évade de nouveau

Les policiers et les militaires mexicains sont en état d’alerte depuis que le plus célèbre narcotrafiquant de la planète s’est échappé, samedi 11 juillet, d’une prison du centre du Mexique. Joaquin Guzman, chef du cartel de Sinaloa (nord-ouest), vient d’écrire un nouveau chapitre de sa légende mafieuse. Cette évasion spectaculaire représente un camouflet pour le président Enrique Peña Nieto, qui débute, lundi, une visite d’Etat en France.

Par un tunnel, ingénieusement creusé à dix mètres de profondeur, celui qu’on surnomme « El Chapo (« le trapu ») » s’est évadé vers 21 heures de la prison d’Altiplano à 90 km à l’ouest de Mexico. Ce souterrain de plus d’un kilomètre et demi de long, équipé d’électricité, d’un système de ventilation et de bouteilles d’oxygène, débouchait sur une maison en construction à l’extérieur d’un des établissements pénitentiaires les mieux gardés du pays.
Plus de 1 500 policiers et militaires mobilisés

Depuis, une vaste chasse à l’homme mobilise plus de 1 500 policiers et militaires. Les autorités ont suspendu les vols de l’aéroport voisin de Toluca. Des barrages ont aussi été installés sur les principaux axes routiers de la région. Le fugitif de 60 ans est un spécialiste de l’évasion. Il s’était déjà fait la belle, le 19 janvier 2001, d’une prison de l’Etat de Jalisco (ouest) caché dans un chariot de linge sale. Sa cavale a duré treize ans, durant lesquelles cet homme de petite taille (1,60 m), presque analphabète, a pris les rênes de son cartel, qu’il a transformé en une multinationale mafieuse présente dans une cinquantaine de pays. En 2009, son entrée dans le classement des milliardaires du magazine Forbes lui confère une renommée mondiale. Sans parler de son culot et de son ingéniosité pour construire des tunnels transportant la drogue sous la frontière américaine à la barbe des douaniers.

C’est aussi un souterrain high-tech, reliant sept villas fortifiées à Culiacan (Etat de Sinaloa), qui avait permis au narcotrafiquant le plus recherché au monde, d’échapper, en février 2014, aux forces spéciales de la marine. Quelques jours plus tard, ces dernières capturaient l’ennemi public numéro un dans la station balnéaire de Mazatlan, sur la côte de Sinaloa. Ce joli coup de filet avait été présenté par M. Peña Nieto comme la preuve de l’efficacité de sa stratégie sécuritaire. Au nom de la souveraineté nationale, son gouvernement avait refusé la demande d’extradition émise par les Etats-Unis.

« Affront pour l’Etat mexicain »

Aujourd’hui, les critiques fusent sur le réseau de complicités dont a bénéficié le criminel, alors que dix-huit salariés de la prison sont soupçonnés de l’avoir aidé à fuir. Le président Peña Nieto, qui était en route vers Paris lorsque l’évasion a été rendue publique, a réagi, dimanche, en la qualifiant d’« affront pour l’Etat mexicain », avant de promettre « l’arrestation du délinquant ».

L’enjeu est de taille : « El Chapo » est l’un des principaux instigateurs de la guerre des cartels qui a fait plus de 100 000 morts depuis 2006. D’autant que la nouvelle évasion de ce père de neuf enfants, marié à trois reprises, pourrait doper encore davantage sa popularité auprès des jeunes Mexicains en manque d’opportunités, qui sont nombreux à rejoindre les rangs du crime organisé.

Les exploits mafieux d’« El Chapo » ont déjà inspiré des dizaines de narcorridos, chansons à la gloire des narcotrafiquants. « J’admire son parcours, son intelligence (…). Même si le gouvernement le recherche, il ne parviendra pas à le capturer », chante le groupe Los Buknas de Culiacan. Depuis samedi, ces paroles prémonitoires défient le gouvernement.