
Pourquoi une hésitation? Dans ce dossier de revendication des » arriérés de salaires et piges » qui oppose un personnel gréviste et leur patron, la tournure politique qu’on a voulu lui coller m’étonne.
En Guinée, depuis quelques temps, dès qu’on veut noyer du poisson, il y a des termes appropriés à utiliser : » sabotage » ou » manipulation politique ». Dès que ceux-ci sont employés dans une affaire, quelque nature que ce soit, connaitre la vérité devient difficile.
Mais l’honnêteté intellectuelle et le désir de recherche de la vérité m’imposent à coucher ces mots, en guise de témoignage, pour la postérité.
Pour avoir été accepté en qualité de Stagiaire en 2003 – en classe de Licence- au sein du Groupe de presse l’Indépendant, j’ai appris à connaitre les dures réalités auxquelles faisaient face le personnel. Les discussions des journalistes confirmés -ceux là que je remercie pour mon encadrement- portaient à l’époque sur la qualité du traitement salarial parmi tant d’autres. C’était d’ailleurs une question sempiternelle !
A l’époque, ce qui irritait les journalistes, c’est lorsque ce salaire jugé « insuffisant » n’était pas payé à temps. Quelques fois, même après le paiement de la part qui revient au groupe de presse – avec 3 journaux à l’époque- dans la subvention allouée par l’Etat à la presse privée, la galère pourchassait mes » chefs ».
Cette dure réalité, tout naturellement, a poussé beaucoup d’entre eux à opter pour le système D. Dans la débrouillardise, quelques journalistes avaient le choix de travailler ailleurs ou quitter la rédaction.
Ce qui m’a vraiment frappé à l’Indépendant, c’est la mort de feu Gassim Magassouba, Secrétaire général du journal Le Démocrate, presque sans assistance. Atteint d’une maladie qu’on pouvait vraiment guérir, Gassim a souffert au CHU Donka avant de passer de vie à trépas. Son salaire ne pouvait pas couvrir les frais médicaux !
Entre 2005 et 2006, en ma qualité de pigiste, il m’a été donné de constater le non paiement de salaires et de piges durant quatre à 5 mois ! Toute la rédaction en a pris un sérieux coup. Ce qui n’empêchait, bizarrement, la publication des deux hebdomadaires de la maison par semaine. Le personnel qui avait un courage incommensurable, a été poignardé lorsqu’un jour, le DAF Diakité est venu, en cachette, accorder des » Bons » de quelques milles gnf aux présents. Alors que les employés tiraient le diable par les…testicules puisque la queue étant finie. Excusez du peu ! Mais cette expression avait été trouvée par un » Doyen » de la rédaction à son temps de colère !
Ces dures conditions de travail et le manque de considération des employés de la part des employeurs, m’avaient fait prendre des distances de cette école, l’Indépendant.
A mes yeux, ce n’est pas politique, vu ce vécu, quand on accuse le Groupe de presse l’Indépendant de rester devoir à ses travailleurs. Moi aussi, j’ai laissé des piges non payées jusqu’à ce jour à l’Indépendant. J’en connais d’autres aussi.
Amadou Touré,
Journaliste, Conakry