
Parmi ceux-ci, l’un des plus importants reste la France qui affiche sa volonté d’accompagner le pays dans ses efforts de consolidation de la démocratie et de transformations socioéconomiques. La récente visite d’Alpha Condé à Paris a permis de confirmer cette tendance. Déjà, la France a annulé une partie de ses créances sur la Guinée et l’Agence française de développement (AFD) a signé plusieurs conventions de financement avec le ministère de Finances. Les domaines d’intervention de la France sont nombreux : formation, réforme des secteurs de la défense, de la sécurité et de la justice, appui à la société civile, énergie et transport, amélioration des capacités de gouvernance, etc.
L’un des acteurs de cette coopération franco-guinéenne redynamisée est l’ambassadeur Bertrand Cochery, en poste à Conakry depuis février 2012. Le diplomate français réaffirme la volonté de son gouvernement de « continuer à soutenir la Guinée » dans ses efforts de réforme et de développement. Habitué de la Guinée où il a déjà servi en qualité de conseiller de 1996 à 1999, l’homme se montre confiant et optimiste quant à l’évolution future du pays. La tenue des législatives, sans doute avant la fin de l’année, sera l’occasion d’intensifier davantage une coopération que les deux parties souhaitent fructueuse et constructive.
Dans cet entretien qu’il nous accordé récemment dans ses bureaux de Kaloum, à Conakry, l’ambassadeur de France en Guinée et en Sierra Leone se dit satisfait des réformes entreprises par la Guinée pour se moderniser et construire un État de droit. Bertrand Cochery explique en outre les métamorphoses de la politique africaine du nouveau gouvernement français, lequel cherche à mettre l’accent sur le développement qui demeure l’objectif et la finalité de tous les efforts de coopération. Première partie…
Vous êtes en Guinée depuis près de six mois. Vous arrivez dans un contexte particulier : la Guinée post-élection présidentielle et la Guinée avant les législatives. Comment se passent votre installation et vos premiers contacts avec les autorités guinéennes ?
Effectivement je suis arrivé dans un contexte qui était marqué du côté français par la volonté de nouer une relation plus forte et plus intense avec la Guinée. C’est la raison pour laquelle lorsque j’ai remis mes lettres de créances au président Alpha Condé le 22 février dernier, je lui ai dit que j’étais porteur d’un message d’amitié, de confiance et de détermination pour que les relations soient plus riches et plus fructueuses entre nos deux pays. Et, ce, en nous inscrivant en particulier dans le contexte nouveau ouvert par la première élection démocratique d’un président de la république en Guinée en 2010 : l’élection d’Alpha Condé, pour bâtir une coopération plus forte entre nos deux pays.
Six mois après mon arrivée, je dois dire que je suis assez satisfait du tour que prennent les choses. Ce nouveau départ que prend la relation franco-guinéenne et que la récente visite à Paris du président Alpha Condé a clairement illustré. Lors de cette visite, le président Alpha Condé a pu s’entretenir avec son homologue François Hollande, nouvellement élu. Il a rencontré également les ministres des Affaires étrangères, de la Défense, de l’Economie et des Finances, de l’Intérieur, ainsi que le premier président de la Cour des comptes, notamment. Donc ce sont les principales autorités françaises qu’il a pu rencontrer, auprès desquelles il a pu faire valoir les efforts, les défis et les enjeux de la situation actuelle en Guinée. On a également beaucoup parlé de la situation dans la Sous-Région ouest-africaine.
La fête du 14 juillet est une date assez mémorable pour les Français depuis des générations. Cette année, la fête a eu lieu dans un contexte particulier aussi en France avec un changement de président et de majorité pour gouverner le pays…
Comme vous le dites, le 14 juillet dernier a été la première fête nationale du nouveau président et du nouveau gouvernement, dans un contexte de volonté de changement qui a été clairement exprimé lors des élections législatives qui ont donné une large majorité au président François Hollande. Pour ce qui est du message concernant nos relations avec les pays africains, c’est un message de confiance et de responsabilité tel que le président l’a exprimé notamment à Rio de Janeiro [lors du sommet Rio+20 sur le développement durable] ou lors de ses différents entretiens bilatéraux. Tourner la page d’une certaine manière de gérer les relations avec les pays africains, donner plus de responsabilité à ceux qui sont à la tête de ces Etats et qui ont la charge de conduire leur pays dans un environnement qui n’est pas toujours facile mais qui est un environnement très riche de potentialités. Notre approche repose sur trois idées maitresses : le principe de la bonne gouvernance, le développement et la sécurité. C’est ce triptyque qui est l’objectif à atteindre pour que les pays africains puissent prendre toute leur part à la construction d’un monde plus équilibré, plus stable et plus juste.
Est-ce que c’est ce qui explique le changement de dénomination du ministère qui est en charge des relations avec l’Afrique, le ministère de la coopération qui devient ministère de du développement ?
Je pense effectivement que lorsqu’on parlait d’un ministère de la Coopération, on avait un terme qui était surtout en rapport avec l’instrument que nous utilisions pour travailler avec les pays africains. C’était cela l’approche première. Lorsque l’on parle de développement, on se place davantage sur l’objectif et le résultat, en se plaçant plus du côté du pays bénéficiaire. C’est là que l’on voit un repositionnement. Cela étant, nous avons toujours à l’intérieur de l’ambassade un service de coopération et d’action culturelle, et nous avions déjà dans la panoplie des moyens de la France une Agence française de développement. Des structures qui travaillent étroitement ensemble sous l’autorité de l’ambassadeur. Ça ne veut pas dire que l’un devient du jour au lendemain plus important que l’autre. Non. C’est simplement que nous réfléchissons et nous agissons avec cet objectif premier et fondamental du développement en prenant en considération les paramètres et les conditions pour un bon développement ; que nous choisissions quels sont les terrains prioritaires sur lesquels nous devons agir dans une perspective durable.
Je pense que cette notion de durée est très importante. Surtout lorsque l’on est confronté à des pays qui ont d’un côté un potentiel considérable –c’est le cas de la Guinée– mais de l’autre, des défis considérables à relever. Je pense notamment à la question de la formation professionnelle qui, au regard de l’expérience que j’ai déjà de ce pays, me paraît un des défis les plus important à relever pour que la Guinée puissent projeter des opportunités économiques qui se présentent notamment dans le secteur minier.
Réalisé par Sékouna Keita
Source: Horoya n°7285 du 13 Juillet 2012