dimanche , 26 mars 2023

Chérif Idrissa : «Le président Alpha doit éviter de tomber dans le même piège que ses prédécesseurs»

Après une période de silence total radio, l’ex-ministre conseiller chargé de la Communication sous Dadis, Chérif Idrissa qui est actuellement de passage à Conakry, rompt enfin le mutisme.

Dans un entretien à bâton rompu qu’il vient d’accorder à l’Indépendant, que nous vous livrons en deux parties, l’ancien porte-parole du chef de la junte nous parle de tout sur son mentor, le capitaine Dadis qui est confiné à Ouaga depuis son éviction du pouvoir : sa nouvelle vie au pays des Hommes Intègres, ses rapports avec les anciens collaborateurs et compagnons d’armes du CNND. Notamment celui avec ses successeurs, le général Sékouba ‘’El Tigre’’ Konaté et le Pr Alpha Condé. Outre, cette parenthèse sur la vie du capitaine Dadis, Chérif Idrissa aborde avec philosophie le bilan de ce début de mandat du président Guinéen, ses relations avec Guillaume Soro, le Premier Ivoirien, sa perception de la vie politique en Côte d’Ivoire. Sans oublier ses déboires en cours avec le commissaire divisionnaire de police, Sékou Socrates Kéïta qui vient de lui retirer sa voiture. Lisez !

Que devient Chérif Idrissa, plus d’un ans après son départ du gouvernement ?

Chérif Idrissa : Je tiens à vous dire que depuis février 2010, juste après la formation de la nouvelle gouvernementale du président de la Transition, le général Sékouba Konaté, je suis allé me reposer auprès de mon frère et ami, le capitaine Moussa Dadis Camara pour l’accompagner dans son état de convalescence à Ouagadougou. Après, je suis rentré sur Abidjan où j’ai ma famille. Sachez aussi que, parallèlement, je suis un opérateur économique. Donc je gère certaines de mes activités mais aussi je suis une ligne de conduite politique qui constitue pour moi une nouvelle renaissance politique. Je suis en train de voir comment apporter ma modeste contribution à la vie politique de la nation.

Vous faites la navette entre Abidjan et Ouagadougou où se trouve le capitaine Dadis qui poursuit officiellement encore sa convalescence. Dites-nous comment se porte-t-il aujourd’hui ?

Chérif Idrissa : Tout ce que je puis vous dire, c’est qu’actuellement le président Dadis va bien. A ce jour, l’état de convalescence étant dépassé, je peux dire que le président Dadis est guéri. Il jouit de toutes ses facultés mentales et physiques. Aujourd’hui, son moral est au beau fixe et il va au mieux de sa forme. Pour vous rassurer, je vous informe que le président Alpha Condé l’a rencontré à plusieurs reprises. Ceux qui ont quitté Conakry pour Ouaga, l’ont aussi rencontré. Il y est en attendant de rentrer, il est dans son état de repos.

Le capitaine Dadis est à Ouaga sous prétexte qu’il y poursuit sa convalescence. Cette convalescence étant terminée, dites qu’est-ce qui retarde son retour au bercail ?

Chérif Idrissa : Vous savez que le capitaine Dadis, à un moment donné, a été chef de l’Etat et président de la République de Guinée pendant la Transition. Aussi, vous le savez qu’il est parti de la Guinée suite à une tentative d’assassinat sur sa personne… En tenant compte de toutes ces considérations, nous estimons que pour son retour en Guinée, il va falloir régler avec les nouvelles autorités du pays, ces détails d’ordre fondamentalement sécuritaire. A part cela, il vit de lui-même à Ouagadougou. Le Président Alpha Condé lui a déjà fait savoir qu’il pourra rentrer en Guinée quand il le voudra. Ce voudra donc dire que le capitaine Dadis, en dehors des détails dont je viens de faire cas, est largement maître de son agenda de retour.

Vous affirmez que le capitaine s’est refait santé et d’aucuns vont même jusqu’à dire qu’il s’est refait une nouvelle vie en épousant une deuxième femme. Qu’en dites-vous ?

Chérif Idrissa : (Rire.) Je pense que ceux qui véhiculent une telle information, n’ont pas fait la bonne lecture des faits. Le capitaine Dadis n’a fait que formaliser, disons légitimer à l’église de façon religieuse son mariage avec sa femme, l’ex-première dame, Jeannette Dadis Camara que toute la Guinée connaît. Ce n’est pas une autre épouse qu’il est allé chercher, non. Il est et reste toujours avec Jeannette Dadis. Il ne s’est jamais remarié à Ouaga.

En observateur de la vie nationale, quel bilan dressez-vous des cinq premiers mois du quinquennat du Pr Alpha Condé ?

Chérif Idrissa : Comme je l’ai dit une fois dans une de mes interviews avec un autre site de la place avant l’investiture, chose que je maintiens encore, c’est que chaque guinéen et guinéenne patriote a le devoir et le droit d’aider le nouveau président guinéen, le Pr Alpha Condé. Si dans les autres pays, nous sommes allés de l’Etat à la nation, en Guinée, ce n’est pas le cas. Ici, nous sommes en train de constituer pour le moment l’Etat avant d’aller à la nation. Ce qui sous-entend qu’il nous reste à franchir d’énormes difficultés. Point n’est ici de le rappeler et comme le Pr Alpha Condé lui-même aime à le dire qu’il a hérité d’un pays et non d’un Etat. C’est pourquoi j’en appelle au bon sens des uns et des autres de faire un sursis au nouveau président élu, le Pr Alpha Condé afin de lui permettre de poser les jalons pour un véritable décollage. Pour qu’un avion puisse décoller et atteindre sa vitesse de croisière, il faut qu’il soit d’abord sur sa trajectoire. C’est pourquoi je lance un appel à tous les Guinéens pour aider le président Alpha Condé. Mais lui ne peut aider tout le monde. Il faudrait que chaque Guinéen accepte ce sacrifice en accompagnant de manière positive, le Pr Alpha dans sa lourde mission que le peuple lui a confiée. Quant au Président Alpha Condé, il doit constamment avoir à l’idée qu’il est le président, le père de tous les Guinéens et que l’une des priorités majeures doit être la réconciliation nationale. Que tous les Guinéens se sentent d’abord guinéen avant de se sentir Soussou, Guerzé, Malinké, Peul, Toma, Kissi… Nous devons, avant, être animés, chacun, par ce sens profond du patriotisme vrai. Tant que ces éléments basiques ne sont pas réunis, il sera particulièrement pénible pour la Guinée et ses nouveaux dirigeants de sortir de l’auberge. Que le président Alpha sache qu’il ne pourra jamais diriger avec une partie du peuple ou en excluant l’autre. Il doit faire en sorte pour gagner le pari de la réconciliation qu’il a tant prônée, en associant toutes composantes de la nation. Pour que la Guinée soit une nation forte, unie et prospère, il doit pouvoir impérativement puiser dans toutes potentialités humaines de la Guinée où qu’elles se trouveraient sans aucune discrimination. Pour relever ce défi, il doit beaucoup se méfier des nombreux délateurs et autres mouchards qui viendront rapporter parfois sans la moindre preuve d’autres guinéens pour tel ou tel motif. Il ne doit pas tomber dans le même piège que ses prédécesseurs. Depuis l’indépendance, les présidents successifs ont échoué à cause de ces pratiques politiques d’un autre âge. Parce que ce sont ces délateurs qui l’ont mis en mal avec le Président Sékou Touré, avec Conté et même avec les dirigeants qui ont conduit la Transition. Mais, avec l’habilité politique qu’on lui connaît, il s’en est tiré à bon port. C’est l’ensemble de ce parcours élogieux qui fait aujourd’hui de lui ce qu’il est. Il doit s’appuyer sur ses expériences pour que la Guinée soit un Etat normal. Personne n’a intérêt à ce que la Guinée bascule, avec tout l’espoir que nous nourrissons aujourd’hui, dans un nouveau chaos. Ce qui voudra dire que la clé de la réussite du pays est entre ses mains. Il lui revient le redoutable honneur de faire décoller la Guinée. S’il suit ces délateurs, ils le feront échouer et il sera tenu pour le seul et l’unique responsable, devant Dieu et les Guinéens, de son échec. On ne le souhaite pas du tout, si d’aventure il en arrivait là, ils l’abandonneront tous et en ce moment il sera seul à porter le chapeau. Il a fait l’amère expérience de la prison, il est censé connaître ceux qui l’ont conduit là. Il sait pertinemment combien de fois le Guinéen est champion dans la manipulation et l’hypocrisie. Ceci dit, depuis que je suis arrivé, j’ai constaté que les Guinéens sont parfois trop pressés de voir l’ensemble de leurs préoccupations ou aspirations réalisées ici et maintenant. Tout le monde veut tout et tout de suite. On veut que le président Alpha rattrape le retard de plus de cinquante ans au bout des 4 ou 5 mois qu’il vient de passer dans son quinquennat. Chose qui est pourtant impossible avec lui ou un autre. Il a été élu sur la base d’un programme politique qu’il est en train de mettre en application. Ce qui ne va naturellement pas sans difficultés. Avoir des programmes est une chose mais les appliquer en est une autre. C’est pourquoi les guinéens doivent apprendre à être patients et raisonnables surtout. C’est au président Alpha de faire appel à son bon sens en distinguant les délateurs, les démagogues des cadres intègres, loyaux et rompus à la cause de la nation. Parce que tous ceux qui viennent tous les jours faire devant lui des grimaces ou des délations ne sont forcément pas ceux qui veulent le voir réussir son mandat au bénéfice du peuple qui attend tant de lui. Sur le bilan des cinq premiers mois, je peux dire qu’il y a un bon départ. Ce qui est en train d’être fait est certes encourageant, mais il faut rappeler qu’il reste encore à faire beaucoup. Mais comme je l’ai dit haut, le président a hérité d’une situation catastrophique sans précédent. L’économie du pays a été totalement dilapidée, il n’a pas trouvé grand-chose dans le trésor public, la corruption avait gangrené l’administration, les bailleurs de fonds qui avaient abandonné le pays, traînent malgré le retour à la vie constitutionnelle normale, à mettre la main à la poche pour l’accompagner. Ce qui fait aussi que malgré l’évolution positive que nous enregistrons, il y a une certaine impatience au niveau de la population. Parmi les grands chantiers qui attendent le président, il y a l’éducation, la santé, l’autosuffisance alimentaire, la desserte en eau et l’électricité. Pour tout cela, il faut que les Guinéens s’arment de patience. Le président dispose des recettes qu’il est en train d’appliquer à tous ces problèmes. Donc accordons-lui un sursis d’abord.

Etant un fidèle parmi les fidèles de Dadis, parlez-nous de son rapport entre lui et le Pr Alpha Condé ?

Chérif Idrissa : Le président Dadis est à la fois mon frère, mon ami et mon chef. Je reste toujours son porte-parole et un de ses plus collaborateurs. A ce titre, je dirais que les deux hommes entretiennent de très bons rapports. Entre le président Alpha Condé et le président Dadis, il y a la courtoisie et régulièrement ils s’appellent par téléphone. Les gens qui ont encore une parcelle de doute dans leur esprit, doivent comprendre qu’entre les deux frères tout va pour le mieux. Quant au président Dadis, il n’a qu’un seul souci aujourd’hui, c’est la consolidation de la paix et l’unité entre tous les fils et toutes les filles de Guinée. Le capitaine Dadis, il faut le pratiquer pour le sentir et le savoir, a un cœur généreux. Mais, il a eu le malheur de tomber sur une situation compliquée avec des collaborateurs, pas toujours honnêtes et sincères pour la plupart, et qui l’ont conduit sur le chemin de l’échec ou du mal. Aujourd’hui, c’est le seul regret qu’il a. Sinon, il n’ya aucun problème entre son frère Alpha et lui.

Pourtant, à entendre certains témoignages à Conakry, tel est loin d’être le cas. Parce qu’aux dires de ces témoignages, c’est le président Alpha Condé qui serait opposé au retour au bercail de l’ex-chef de la Junte ?

Chérif Idrissa : Mais pour quelle raison, le président Alpha Condé va s’opposer au retour en Guinée du capitaine Dadis ? Je n’y vois aucunement pas. Ou bien c’est le Pr Alpha Condé qui a assigné le capitaine Dadis à Ouagadougou ? A mon sens, je dis que non. Le président Dadis est libre de rentrer en Guinée quand il voudra et il est libre d’en ressortir quand il le voudra. C’est avant tout un citoyen guinéen libre comme n’importe quel autre. Pour le moment, le capitaine est à Ouagadougou. Et comme je le disais tantôt, il y a certains détails liés à sa sécurité en tant qu’ex-chef d’Etat et président de la République, de logement, il avec toute sa famille ainsi qu’avec ses enfants qui vont à l’école à Ouaga… Ce qui fait qu’il ne peut pas venir brusquement comme ça. Ceux qui sont en train d’entretenir cette confusion dans l’esprit des gens, n’ont pas la bonne information sur le rapport qui existe entre les deux hommes. La preuve est qu’à chaque fois que le président Alpha a le temps de passer à Ouagadougou, il l’a mis toujours à profit pour rendre visite à son frère, le capitaine Dadis. Ils échangent. Parfois devant moi et en d’autres fois je ne suis pas à leurs côtés. Parce qu’avant tout, c’est l’ancien et le nouveau chef d’Etat qui se retrouvent. Je ne prends pas souvent à leurs discussions. Tout cela pour vous dire à haute et intelligible voix que le président Alpha n’est en rien un obstacle à la rentrée du capitaine Dadis.

Dites-nous quel est le rapport entre le capitaine Dadis et ses anciens collaborateurs, compagnons d’armes du CNDD et surtout avec le général Sékouba Konaté ?

Chérif Idrissa : En Guinée, vous le savez, ce n’est pas facile…. Lorsque vous êtes aux commandes, je vous assure que vous êtes tout ce qui est magnifique, grand et fort, sans égal ici-bas. Tous les dieux sont à vos pieds tant que vous avez la voix au chapitre. Mais, à la minute près que vous tombez de votre piédestal, vous perdez le pouvoir, vous aurez dès les mêmes instants tous les déboires et Satan à vos pieds. (Rire.) Là où je vous parle, je puis vous dire qu’il n’y a qu’une seule personne qui soit régulièrement en contact avec le président Dadis. Il n’ya pas deux ni deux, je suis la seule personne qui tourne toujours et permanemment. Même certains qu’on pensait être des proches amis du capitaine Dadis, ne l’appellent pas. Quand vous leur demandez est-ce qu’ils ont les nouvelles du président Dadis. Ils te répondent très gênés, ah mon téléphone est sur écoute (Rire). Moi je ne sais pas pourquoi on va les mettre sur écoute. Si c’est pour dire bonjour à votre frère et lui demander de ses nouvelles et celles de sa famille. Eh bien, je ne vois vraiment pas comment cela peut coûter quelque chose à quelqu’un quand on doit dire bonjour ou bonsoir à quelqu’un. C’est cela aussi le propre des Guinéens. Tous ceux qui se réclament être des amis ou proches du président Dadis, il faut leur dire qu’ils vous mentent parce qu’ils ne sont pas sincères. Le président Dadis vit seul avec sa famille à Ouagadougou. Cependant, je vous le dis honnêtement qu’il garde le moral haut.

Voulez-nous dire que le pont est donc coupé entre le général Sékouba et le capitaine Dadis ?

Chérif Idrissa : Oui mais… vous savez quand même comment la Transition a été gérée. Cette transition, à mon sens, devait faire sien le cas Dadis. Les Accords politiques de Ouagadougou disent que le capitaine Dadis devait être tenu au préalable de toutes les grandes décisions concernant cette Transition. Mais très malheureusement, c’est le contraire qui a été fait. Dadis n’a pas été consulté. Tout a été fait à son insu. Et j’ai été celui qui le conseille le plus souvent en disant que ce que le général Sékouba Konaté est en train de faire, il le fait pour nous, pour vous et pour le peuple entier de Guinée. Mais en réalité, je l’affirmais sans trop grande conviction. Le général Konaté a agi ainsi de son propre chef ou qu’il a écouté les conseils d’autres personnes. Parce que sincèrement, je n’ai pas reconnu le général Sékouba dans ses attitudes. Je n’en revenais quand même pas. J’avais personnellement foi en l’homme et à tout ce qu’il a promis à son frère d’armes, le capitaine Dadis jusqu’au terme de la transition. Je ne lui ai jamais fait moindre part de ma confiance. Mais par finir, il m’a couvert de honte devant le capitaine Dadis. Je vous dis que si Dadis est resté à Ouagadougou, c’est parce que simplement il a choisi, pour beaucoup de raisons, d’y rester. Le président Compaoré m’a demandé d’intervenir auprès de Dadis et le dissuader de rentrer à l’époque à Conakry. Je m’y suis attelé et j’ai réussi à le convaincre à admettre cela. Jusqu’à la signature des Accords, il n’admettait point de rester à Ouagadougou. Il tenait et de façon acharnée à rentrer en Guinée. J’ai joui de toute mon habilité pour le dissuader. Il a fini par l’accepter. Il a ajouté en acceptant que si c’est en restant à Ouagadougou que la Guinée pourra connaître la paix, lui épargner la guerre, des affrontements, il a cédé. Il a aussi indiqué que si c’est sa présence en Guinée qui devait gêner, embraser le pays, je vais le démontrer au peuple de Guinée et à la face du monde que je suis patriote en restant à Ouagadougou jusqu’à la fin du processus de la Transition. Il s’est dit de toutes les façons qu’il n’est pas né avec le pouvoir et que c’est Dieu qui le donne et l’arrache quand il le veut. En bon croyant, il a dit respectons cette volonté divine et attendons ce qu’il nous réserve dans l’avenir. J’ai été fier de lui lorsque je l’ai entendu finalement dire tout cela. Je ne suis pas en train de dire qu’au tout début le général était de mauvaise foi. Mais son malheur c’est qu’il s’est fait entourer de personnes qui ne savaient rien en ce qui a été conclu entre lui et son frère Dadis depuis le jour de la prise du pouvoir jusqu’aux Accords de Ouaga. Nous, on était là. On a été témoin du pacte qui a lié ces deux hommes. Ce sont ces arrivistes qui ont induit Dadis en erreur, qui ont aussi induit le général Konaté en erreur en le poussant à s’éloigner de son ami. Ils les ont opposés. Mais, qu’à cela ne tienne, je dis à tout moment au capitaine Dadis de se mettre au-dessus de toutes ces considérations. Je l’invite à rencontrer et à parler avec le général Konaté, son frère et ami. Mon rôle est demeuré toujours le même, celui de les rassembler tant que cela est possible. Cependant, un moment viendra, je dirai toutes les vérités sur tout cela et chacun comprendra ce qui s’est réellement passé. Parce que nous avons aussi été des victimes de ceux qui sont venus après nous au pouvoir. Il a fallu que les évènements malheureux du 28 septembre arrivent pour que nous, nous puissions nous rapprocher du président Dadis. Parce que ceux qui devaient le défendre, ont failli à leur devoir. Ils ont refusé de s’exprimer. Devant cette faillite, j’étais obligé de prendre le devant de la scène pour communiquer et tenter de sauver ce qui pouvait l’être. Il y a même des gens qui me disaient de ne pas défendre Dadis parce que j’ai été victime de lui. Je leur répondais que si j’ai accepté la promotion qu’il m’a faite, je dois l’assumer. L’occasion m’était ainsi offerte de démontrer au président Dadis ce dont j’étais capable et ce que je savais faire pour lui. Dadis, je le redis, est un homme qui ne peut faire du mal même à une mouche. Il a un cœur d’une grande générosité. S’il y a crimes graves qu’on met sur lui, je n’en crois pas. Mais, la vérité finira par triompher de toutes ces fausses allégations qu’on lui reproche. Et le peuple de Guinée sera édifié. Car, il saura qui sont les véritables commanditaires ou responsables de ces tragiques et regrettables événements du 28 septembre. Ils l’ont juste fait pour pouvoir l’écarter de la présidence. Ils ont ainsi réussi leur coup et on en parle plus. Il y a des familles qui ont été endeuillées, on en parle plus. Parce que ces gens sont arrivés à leur fin en trahissant tout le monde. Et moi, je n’ai pas manqué de le dire au président Dadis que le meilleur moyen pour le blanchir, c’était de sanctionner tous ceux qui étaient mêlés à ces événements. Le peuple et la communauté internationale sauront publiquement, sanctionnons-les. Mais, je suis resté incompris.

Vous vous êtes tout à l’heure montré assez optimiste sur ce début de mandat du président Alpha Condé. Pourtant, selon des informations, un commissaire de police, jugé très proche du chef de l’Etat, aurait saisi votre véhicule. Est-ce exacte, cette information. Si oui, pour quelles raisons ?

Chérif Idrissa : Vous savez, il y a un conseil populaire africain nous enseigne que pour être grand, il faut pouvoir supporter tout. La femme, excusez-moi d’avoir pris cet exemple, assimile la douleur de l’accouchement. Pourtant, il n’y a pas dans la vie d’une femme quelque chose de plus douloureux que l’accouchement. Mais cela n’empêche point les femmes de continuer à procréer. Elles continuent toujours à enfanter. Cela, je rappelle que j’ai travaillé avec feu général Lansana Conté, avec le président Dadis dans ce pays. En dehors de cela, j’ai des entrées au niveau de certains palais africains pour avoir lié amitié avec des chefs d’Etat. J’ai des amitiés très profondes avec le président Togolais, Faure Gnassingbé, le président du Faso, Blaise Compaoré, le président du Mali ATT, le président congolais, Joseph Kabila… Ils sont tous des amis, des frères. C’est ce qui fait que je peux me permettre d’affirmer que j’ai une certaine notion plus moins tronquée du fonctionnement d’une présidence de la République, comment cette institution marche à peu près. Je vois comment certaines personnes, qui n’ont jamais imaginé être un jour auprès d’un président de la République comme proche collaborateur, se comportent dans l’exercice de leur fonction. Ils pensent qu’avoir une telle posture est un miracle ou une quelconque ascension dans la vie. Très malheureusement, ces gens croient qu’une fois là, il leur est permis de tout faire. Ce sont ces mêmes gens qui agissent en faisant du tort à leurs prochains au nom du président de la République. Je suis un homme qui a énormément foi en Dieu et je reste profondément persuadé que ce commissaire qui a confisqué ma voiture n’a agi que de son propre chef et qu’il n’a reçu le mandat de qui que ce soit. A plus forte raison du président Alpha Condé. Les gens confondent l’exerce du pouvoir à la dictature. Il y a des personnes qui font du n’importe quoi et disent que c’est le chef qui l’a autorisé. Je vous confirme que depuis le 5 avril dernier ma voiture est confisquée par le commissaire divisionnaire, Sékou Socrates Kéïta. C’est au siège de la Commission nationale de la lutte contre les armes légères (Comnat-Guinée), situé entre le palais du peuple et le jardin 2 octobre sur la route du Niger, qu’on m’a retiré ma voiture. Le commissaire Sékou Socrates s’est présenté à moi, comme étant le commissaire principal du Pr Alpha Condé. Il me pose la question de savoir quand j’étais à l’hôtel Novotel, qui me payait les factures. Je lui ai fait comprendre que c’était l’Etat guinéen qui assurait la garantie et je lui ai immédiatement fourni une copie de cette prise en charge. Ensuite, il me demande qui m’a donné ce véhicule, je lui ai répondu qu’il m’a été offert par le président Moussa Dadis Camara. Il s’agit d’une voiture 4X4 de marque Toyota Land Cruiser Prado RC 5517 G. Il rétorque que c’est faux. Il me dit que c’est un véhicule du parc automobile du garage gouvernement. Je lui ai aussitôt fait savoir que j’avais rendu la voiture de service que j’avais lorsque j’étais aux affaires. C’était la voiture Toyota Corolla de la même marque que celles qu’on avait livrées aux ministres du gouvernement Kouyaté au temps du président Conté. Cette VA, je l’ai rendue avant lorsqu’on a quitté le gouvernement. La Prado dont il est question m’a été offerte par le président Moussa Dadis. C’est Diouldé de TANE qu’il a appelé pour lui dire de me trouver une voiture. Puisque celui-ci n’en avait pas, il est allé voir un de ses amis vendeurs de véhicules. C’est chez lui, j’ai fait mon choix et on est reparti. A l’époque, le capitaine Dadis a donné des instructions au directeur du garage gouvernement, le colonel David Soumah de mettre le véhicule en mon nom. C’est ce qui fut fait et une certification de donation m’a été établie. Je prends tous ces documents et je les remets à Socrates. Il me dit qu’il s’agit juste d’une petite enquête pour voir si le véhicule m’appartenait. Vous savez… Je n’aimerai pas entrer dans une querelle de voiture. J’ai été ministre de la République. Si Socrates doute de la provenance du véhicule et qu’il a été mandaté officiellement par l’Etat guinéen, qu’il me le prouve. Parce qu’il ne m’a brandi aucun document officiel lui mandatant d’agir à mon encontre. Il m’a envoyé un capitaine du nom de Mory Camara qui se dit être l’aide de camp adjoint du président de la République pour me conduire à son bureau que je viens de décrire. Ce capitaine me dit allons-y chez Socrates, c’est lui qui a ton programme en main. Alors, j’ai accepté de venir avec ce militaire au bureau de Socrates. En cours de route, le militaire me dit que sa voiture est en panne, qu’il va déposer celle-ci et monter à bord de la mienne. C’est ainsi qu’il est allé déposer sa voiture et est venu avec moi dans la mienne. Arrivé au niveau du palais du peuple, il appelle au téléphone et lui dit : Papa, je suis là, on est ensemble. Il faut venir vite. Quelque temps après, c’est Socrates qui débarque. Il m’a posé des questions dont je vous ai fait part plus loin. Il me dit finalement garer le véhicule ici et de prendre tout ce que j’ai à bord. Il m’a ensuite réclamé les documents du véhicule. Je n’y fis aucune objection. J’ai obtempéré et je lui ai laissé tous les documents de ma voiture et je lui ai aussi laissé tout le temps nécessaire pour qu’il mène ses investigations. Depuis le 5 avril jusqu’aujourd’hui, ma voiture est immobilisée par Socrates au siège du Comnat/Guinée. En attendant, je suis allé rencontrer le ministre d’Etat chargé de la Sécurité, le général de division, Mamadou Toto Camara. Celui-ci était tombé des nues. Il m’a dit qu’il n’a reçu et n’a donné aucune instruction à propos. Si on doit donner des instructions de cette nature, je crois être la première personne concernée. Il m’a envoyé par la suite à son secrétaire général, Chapo Touré. Ils se sont tous renseignés partout. Nulle part il n’a indiqué qu’une telle instruction a été donnée à la police. De là, je me suis rendu au chef d’état-major de la gendarmerie. Là, le chef d’état-major de la gendarmerie, le général Ibrahima Baldé, me répond que ses services n’ont non plus reçu aucune instruction pour cela. En tant qu’ancien ministre de la République, je jouis de l’immunité et lui, Socrates me doit, à cause de cela, respect et considérations. Dans aucun pays au monde, un ancien ministre de la République ne peut être traité de la sorte. Et de tels agissements m’ont automatiquement fait rappeler d’autres sous le régime de feu Ahmed Sékou Touré. C’est-à-dire un Etat policier, de susceptibilité qui commettait des exactions sur sa propre population. Chose que je regrette profondément. Je déplore qu’il y ait encore parmi nous et dans les hautes sphères de l’administration guinéenne ces gens qui se livrent à des pratiques ignominieuses d’une bassesse digne de l’autre siècle. Nous pensons qu’une fois après l’élection du Pr Alpha Condé, ces spécimens allaient complètement cesser d’exister en Guinée. Hélas ! En voilà des gens qui continuent à saper ces aspirations et sacrifices du peuple de Guinée et qui, résolus dans leur allergie au changement prôné par le nouveau président, veulent à tout prix nous ramener à des périodes douloureuses d’injustice. Des policiers comme Socrates qui ont passé tout leur temps sous le régime Sékou Touré à ne faire que du tort et du mal aux Guinéens, ne sont plus des gens sur qui compter pour faire le changement et la révolution que revendique le peuple. En tout cas ; cet agissement de Socrates est l’exact contraire des idéaux de changement et de justice défendus dans tous les discours du président Alpha Condé. Il y a un écart d’océan entre ce collaborateur fait et la volonté exprimée par le président de la République. Je suis sûr et certain que le Pr Alpha Condé que je connais n’en est absolument pour rien. C’est pour quoi, je ne veux pas prêter le flanc pour que d’autres se saisissent de cette affaire pour nuire à sa réputation.

A part les généraux Toto et Baldé, est-ce que vous avez tenté de saisir les autorités judiciaires et pourquoi pas le chef de l’Etat ?

Chérif Idrissa : J’ai rencontré le ministre de la Justice et lui ai fait part de ce dont j’ai été victime. J’ai aussi rencontré certains de mes frères qui sont de très proches collaborateurs du Pr Alpha Condé. Parmi lesquels, Kabinet Bill Gate Sylla. Ce dernier et moi avons les mêmes grands pères. J’ai aussi un oncle qui est un des gardes rapprochés du président Alpha. Il s’appelle Aya Madi Sylla. C’est tout ce qui fait que je suis très mal placé pour aller crier sur tous les toits comme quoi le régime du Pr Alpha Condé a confisqué ma voiture. Si nous aimons Alpha, nous devons l’aider à résoudre les problèmes du pays et non lui en créer. Car, on ne doit pas créer de problème au chef, on doit lui proposer des solutions. Cela m’a fait rigoler quand Socrates s’est mis à m’informer qu’il existe des Bic, des briquets espions maintenant comme si ces prouesses de la Hi-Tech viennent d’être découvertes par lui. Vraiment, je ne souhaite pas que ce que je suis en train de dire soit un fait d’accusation contre le Président Alpha Condé.

Quand vous avez porté le problème devant le ministre de la Justice, quelle a été sa réaction ?

Chérif Idrissa : Le ministre de la Justice, lorsqu’il a été saisi de l’affaire, était très touché et m’a salué. Il m’a dit, Chérif tu as fait preuve de grandeur. Mais avant tout tu es un citoyen guinéen, donc tu as la latitude de porter plainte partout où tu voudras pour que justice soit faite. Il m’a conseillé de me constituer en plaignant. En tant que ministre de la Justice et avocat de formation, je suis là pour tout le monde. Cela m’a rassuré. Il m’a dit Chérif ce que tu vis, je le ressens aussi parce qu’un jour nous pourrons être victimes de la même chose. C’est la raison pour laquelle, nous nous battons tous auprès du président Alpha Condé pour qu’il y ait une véritable justice en Guinée, a indiqué Me Christian Sow. Je suis sorti fier et grandi de son bureau. Au sortir de chez lui, j’ai pris un avocat et porté plainte contre Socrates.

Est-ce que vous avez tenté les mêmes démarches auprès du président de la République pour l’en informer ?

Chérif Idrissa : Tout de suite, j’ai expliqué que certains de ses proches collaborateurs qui sont mes propres parents, sont déjà au courant. Si je dois aller voir le président Alpha, je pense que c’est pour lui parler d’autres choses. Je ne lui parlerai jamais de ce problème de voiture. Parce que je me vois très mal assis devant le chef de l’Etat et parler de ce problème de voiture. Personnellement je ne veux pas rentrer dans ces démarches viles. Ce qui m’est arrivé est à l’initiative de Socrates et de ses acolytes, le Pr Alpha n’a rien à y voir. Ils veulent toujours vivre comme ils l’ont toujours fait sous le régime Sékou Touré. Ils vivent en fait de la délation, de la spoliation des autres. Ce que je peux ajouter à cela c’est que Socrates se trompe totalement de cible. Parce que je ne suis mêlé à aucune concussion ni de près ni de loin. Je leur lance ici ce défi et ils peuvent aller jusqu’au trésor national. Sur ce plan, j’ai la conscience tranquille. A Socrates de démontrer le contraire. De tout ce temps que j’ai passé aux affaires, la seule chose que j’ai eue, a été cette voiture qui m’a été offerte par le capitaine Dadis. C’est le même qui m’a logé à l’hôtel Novotel. Je ne vois pas comment le Pr Alpha puisse loger aujourd’hui un de ses ministres au Novotel et que demain on laisse les documents officiels de l’Etat et on vient s’en prendre à ce ministre. Je dis que cela est de l’arbitraire. D’ailleurs, je n’étais pas le seul ministre que Dadis avait fait loger dans cet hôtel, il y avait d’autres ministres à l’époque comme l’ex-ministre de l’Agriculture, le général Bouréma Condé et actuel chef d’état-major particulier du Pr Alpha Condé, qui était logé à la suite 912 et moi j’étais à la suite 915. Comme le général Bouréma Condé, j’ai été officiellement logé par l’Etat de Guinée. Si on doit saisir quelqu’un qu’on saisisse l’Etat et qu’on me laisse moi en paix. Je ne vois pas ce lien entre cet hébergement au Novotel et ma voiture. Je rappelle même qu’il y en a d’autres qui sont encore logés là-bas. Pourquoi on ne vient pas leur demander les mêmes comptes. Et ce qui m’a sidéré, c’est le fait qu’il me reproche d’avoir beaucoup parlé pour Dadis quand j’étais ministre conseiller de la Communication. En vertu de quoi Socrates peut me poser une telle question. Il me dit tu parlais beaucoup, beaucoup pour Dadis. J’ai compris aussitôt qu’il veut mettre en mal le Pr Alpha Condé et le Capitaine Dadis. Lui Socrates, n’est pas pour réconcilier mais pour enflammer la haine et la tension inutilement entre les gens. Par la suite, il me pose d’autres questions sur le président Dadis. Il se fait passer pour un enquêteur je ne sais à la solde de qui. Il me demande comment on a géré, comment le capitaine Dadis vivait, comment il mange à Ouagadougou, paie ses factures… Je me suis dit qu’il a perdu totalement le pôle nord ou bien il est dépassé par le fait que le Pr Alpha ait fait de lui un de ses proches. Il doit être assurément perdu. Depuis la disparition du président Sékou Touré, il y a plus de 27 ans, il n’avait jamais été aussi proche de la présidence comme maintenant. S’il me reproche quelque chose, qu’il me dise et qu’il saisisse la justice contre moi. C’est aussi simple. Au lieu de cela, il tombe sur moi et m’enlève ma voiture. Quand pour la dernière fois, je l’ai rencontré à la gendarmerie, je lui ai dit de me donner ma voiture, il me dit carrément que si je lui donnais cette voiture, en quoi cela me coûterait. J’ai répliqué que c’est parce que Chérif est gentil et même si on tombait sur lui et l’enlever sa voiture, il te l’offrira en cadeau. Je peux le lui donner mais pas dans cette condition. Je n’ai pas la prétention de dire que je suis blanc comme neige, mais de mon poste de ministre, je n’ai reçu aucun budget de fonctionnement. On ne m’a jamais installé dans un bureau de Conseil jusqu’à ma nomination comme ministre. Je dispose d’aucune ardoise ni aux finances ni au trésor public. Mon salaire de conseiller n’a jamais été payé et je n’ai pu bénéficier que de mes quatre mois de ministre de la République. Donc en un an de fonction, je n’ai eu que 4 mois de salaires. A cela, vient s’ajouter les primes dont j’ai bénéficié dans ma mission sur Ouagadougou. C’était en tout 1000 dollars pour au moins cinq jours de mission. En dehors, il n’y en a d’autres. Donc, Socrates se trompe de personne. Il m’a même traité d’Ivoirien et m’a menacé d’expulsion de la Guinée. Je dis qu’il est vraiment perdu. Il aurait mieux fait de demander maintenant sa mise à la retraite. Cela lui fera du bien et il pourra comprendre comment le monde actuel fonctionne normalement.

A votre avis, est-ce que vous n’êtes pas en train de payer votre proximité avec certaines personnalités politiques actuelles ivoiriennes, notamment avec le Premier ministre Soro Guillaume ?

Chérif Idrissa : Le Premier ministre de la Côte d’Ivoire, Soro Guillaume est mon jeune frère et ami. Mes rapports avec lui sont ceux d’amitié très profonde. Soro et moi sommes régulièrement en contact et nous nous appelions au moins trois fois par semaine. C’est mon frère et confident, je le sens très courageux. Nous avons près de 15 ans d’amitié. On se connaissait bien avant la crise ivoirienne. Et d’ailleurs avec mes amitiés avec lui, certains affirmaient que j’étais très proche de la rébellion ivoirienne qu’il dirigeait. J’ai fait sa connaissance lorsque je travaillais au ministère de l’Enseignement Supérieur et à l’époque, Soro était lui, étudiant et président de la FESCI. Nos rapports n’ont rien de politique. C’est seulement quand je suis devenu ministre Conseiller chargé de la Communication, que nous parlions de temps à autre de sujet politique.

Quelle lecture faites-vous aujourd’hui de la situation politique actuelle ivoirienne après l’investiture du Dr Alassane Ouattara à la présidence de la République ?

Chérif Idrissa : Le peuple ivoirien vient de très loin. La Côte d’Ivoire est un pays qui m’a vu naître. J’y ai toute ma famille. Avec ce que nous sommes en train de voir en Côte d’Ivoire, je dis que c’est le bien qui a finalement triomphé du mal. Lorsque le président Gbagbo était au pouvoir, je n’ai pas manqué d’attirer son attention sur ce que la Côte d’Ivoire courait comme danger. Je lui ai dit qu’il est le père de la démocratie ivoirienne et de respecter le suffrage du peuple ivoirien. Mais tout le monde a été surpris de la dérive qui a suivi le deuxième tour de l’élection présidentielle et son cortège de morts. Dieu merci, la situation commence à se normaliser progressivement et j’ose espérer que les Ivoiriens vont rapidement s’inscrire dans la dynamique de la réconciliation nationale. Le président Alassane Ouattara a prêté serment et est officiellement investi président du pays. Il a choisi son Premier ministre qui va bientôt former son cabinet. Je dis qu’à partir de là, il n’y a plus un portable à deux puces. C’est désormais un portable à une seule puce et que la Côte d’Ivoire n’a plus qu’un président, un seul Premier ministre et un seul gouvernement. Le sens du pardon ne doit pas être un vain mot pour les Ivoiriens. Ils doivent, au-delà des clivages, pouvoir se rassembler et construire ensemble la Côte d’Ivoire. Comme feu président Houphouët Boigny formulait le vœu dans le huitième congrès ordinaire du PDCI en 1990, citation : ‘’Le trésor le plus précieux que j’aimerais laisser aux Ivoiriens, c’est l’amour entre eux, un amour ayant pour socle la paix.’’ Trois ans après, le vieux sage a rendu l’âme.

SOURCE: L’Indépendant